Mes dix prévisions prévisibles improbables pour l’année prochaine

Il y a une prévision qu’il est facile de faire : les cabinets d’études de marché vont nous abreuver de leurs prévisions 2018.

On a bien sûr oublié celles de 2017 et, de toute façon, cela prend trop de temps pour vérifier s’ils ne sont pas trop trompés. On remarquera que les cabinets d’études utilisent la même technique que les concepteurs d’horoscope : proposer des affirmations assez générales pour que tout le monde s’y retrouve, du style « les entreprises vont s’intéresser de plus en plus au Big Data ou, d’ailleurs, à n’importe quelle autre technologie. » Pour ne pas rester à la remorque de nos doctes analystes, je vous propose, moi aussi, mes dix prévisions pour 2018.

1. L’âge moyen des DSI va augmenter d’un an. C’est sûr, en 2018, l’âge moyen, et même l’âge tout court, des DSI va augmenter d’un an. C’est une prévision qui se réalise tous les ans, il n’y a aucune raison qu’on y échappe cette année.

2. Le numérique va digitaliser et le digital va se numériser. Ça devait arriver, à force de toucher du doigt les stratégies de transformation des entreprises, le numérique et le digital (qui appartient aux doigts, selon le Larousse), vont ne faire qu’un. Préférons d’emblée le mot numérique, le terme « digital » porte malheur, car certains DSI en seront encore victimes en 2015. N’oublions pas que la digitale est une plante herbacée vénéneuse, dont l’absorption de seulement 8 grammes de feuille s’avère être létale sur un sujet humain de corpulence moyenne. Tout comme l’absorption d’un discours de plus de huit minutes sur la stratégie digitale peut rendre létal tout système d’information Legacy…

3. Les DSI vont bénéficier automatiquement de comptes pénibilité. Le gouvernement décidera d’attribuer aux DSI, sans conditions, le bénéfice du compte pénibilité. Ce sera la seule profession à en bénéficier par défaut. Les pouvoirs publics ont en effet estimé que non seulement le métier de DSI est pénible, mais aussi les utilisateurs et les clients internes. Et comme ils sont très nombreux à être pénibles, les effets peuvent être dévastateurs…

4. Les silos vont devenir sept. Tout augmente, même ce qui est établi depuis longtemps. En 2018, ce sera historique : les fameux silos suivent le prix du timbre et augmente dans la même proportion. On ne parlera donc plus de système d’information en silos, mais de systèmes d’information en sept lots. Les DSI sont donc affranchis…

5. La réalité augmentée va encore augmenter. Ce phénomène est lié à la perception encore plus fine de la réalité. Les DSI pourront désormais voir des cahiers des charges en quatre dimensions (emmerdements, incompréhensions, charabia, incohérences) et percevoir les factures des fournisseurs également en quatre dimensions (racket, dépendance, audit de renflouage des résultats trimestriels, arrogance).

6. 14 % des entreprises vont faire l’objet d’une transplantation de cœur de métier. Plus les dirigeants vont s’approprier le numérique, plus ils vont être tentés de transformer leurs business modèles. Avec plus ou moins de chance…

7. 32,9 % des DSI vont adopter le « Oops cycle » pour mesurer le taux d’échec des projets. C’est le nouvel outil à la mode, conçu par le cabinet IMEC (Institut qui mérite d’être connu). Le principe : considérer que, par défaut, un projet va échouer, et proposer, à chaque fois qu’il y aura des récriminations des utilisateurs, une bonne excuse pour la DSI. « Ooops… » est le premier niveau, pour les erreurs les moins graves, les autres niveaux étant : « C’est pas moi, c’est le DAF », « les utilisateurs ont changé d’avis », « le consultant est un tocard », « le fournisseur nous a fourgué de vieilles technos »…

8. 28 % des tableaux de bord vont être poussés au-delà des bords jusqu’à tomber dans l’oubli. Par définition, un tableau de bord n’est jamais au centre de la stratégie, sinon ce serait un tableau de milieu. En 2018, les tableaux de bord, qui sont déjà au bord, vont basculer dans le vide. Sidéral, pour certains…

9. 2018 verra la naissance du premier rejeton issu de l’accouplement d’une imprimante 3D et d‘un objet connecté qui ont été laissés sans surveillance.

10. Let IT be va devenir l’hymne officiel du Cigref. L’association de grandes entreprises va négocier avec les titulaires des droits de la chanson « Let it be » des Beatles pour en faire son hymne officiel. Les ayants-droits ont notamment accepté que le « it » soit écrit en majuscules : « Let IT be ». Ainsi soit-il…

Dernière minute. Claude Computing remplacera René Build à la présidence du ÇACRAINT (Communauté Autonome Consacrée Résolument À l’Informatique et aux Nouvelles Technologies).