La connerie consiste à mépriser l’autre, à l’ignorer, à le déconsidérer. Elle consiste en un jugement et un comportement réducteurs, rigides, qui tronquent l’homme et le monde en identifiant la totalité du réel à l’un de ses éléments, jugement définitif, immobile, rigide, auquel s’ajoutent la suffisance, la vanité, l’immodestie.
Ce n’est pas alors la connerie qui devrait nous étonner, mais l’intelligence, car la première est facile, immédiate, alors que la seconde est difficile et lente.
La connerie est une inadéquation constante, têtue et surprenante qui sépare l’homme de lui-même, des autres et du monde.
La connerie est toujours un écart par rapport au réel, à ce qui convient, à ce qui est juste, précis, en relation avec les choses.
Un con peut être un spécialiste, un grand connaisseur. La connerie résidera alors dans l’absence d’humilité, qui tôt ou tard se retournera contre le vaniteux moqueur ou trop exigeant.
Un con peut avoir de l’intelligence, mais il ne l’utilise pas à bon escient.
Le con est un gros-plein-de-satisfaction.
La connerie est liée par essence au simplisme.
Un con, loin d’être un ignorant, a une connaissance, mais il la considère comme aboutie, universelle, nécessaire, définitive alors qu’elle ne l’est pas, ou qu’elle ne l’est qu’en partie. Un con croit savoir et ajoute ainsi à ses propos le contentement.
Un con généralise en utilisant un principe à toutes les sauces, si l’on peut dire, ce qui mène souvent, voire toujours, à l’échec.
Nous participons tous à la connerie ambiante. Et bien sûr nous sommes au courant de telle « information » dans tel magazine people, mais on sait que c’est bête, et en plus « on ne l’achète pas », on l’a vu dans la salle d’attente chez le dentiste. On se dédouane tout en participant à ces conneries.
On pense qu’on ne peut pas nous prendre pour des cons. Et pourtant, nous sommes tous, à un moment ou à un autre, victimes de nos opinions ou de la pensée unique qui s’impose.
Un con peut aussi parfaitement mener à bien un processus sans voir que le but est inutile ou vicié.
Un con ne prend pas en considération, ou fort peu, autrui. Il est peu sympathique, dénigrant ou méprisant. Au con manque alors la psychologie nécessaire pour compatir avec les autres.
On est d’autant plus con qu’on a la capacité de ne pas l’être.
Un con ne tire aucune conclusion de son échec et continue. Il persévère dans son comportement, de même que l’attitude dogmatique fixe l’individu dans une croyance constante qui le met complètement à l’écart des faits. La même attitude fait des ravages chez les technocrates qui appliquent ou mettent au point des règles inapplicables ou totalement imperméables aux situations concrètes. Et ils insistent.
La connerie est une insistance établie que rien ne peut déstabiliser.
Pour éviter ici d’être con, il faut garder sa vigilance, sa lucidité, sa modestie en ne perdant pas de vue le réel.
Le mot con renvoie à des considérations d’ordre intellectuel, lato sensu, l’insulte visant alors les capacités de compréhension : résoudre un problème, comprendre un raisonnement, appréhender des règles logiques, utiliser des paramètres pour mener à bien une finalité.
C’est sans doute dans les extrêmes que l’on trouve le plus de cons.
Un con s’accroche à l’illusion alors que tous les faits, toute l’expérience la révèlent au grand jour comme illusion.