Encore un petit détail…

Lorsque l’on est, comme moi, toujours en quête d’innovation managériale, on a tendance à se tourner vers l’avenir, afin d’anticiper ce qui pourrait être profitable pour notre organisation et nos équipes.

Mais il faut aussi savoir se tourner vers le passé. En regardant récemment une rediffusion d’épisodes de la série policière américaine Columbo, le célèbre lieutenant débraillé, j’ai repéré quelques leçons de management dont on pourrait s’inspirer pour mieux gérer nos relations avec les directions métiers. En effet, le lieutenant utilise plusieurs bonnes techniques bien utiles et qui pourraient faire leurs preuves face à des interlocuteurs qui ne sont pas toujours dans de bonnes dispositions à notre égard. J’en ai identifié dix.

  1. Il reste humble en toutes circonstances. Avec sa voiture d’un autre âge, son costume défraîchi et son imperméable élimé qui ne le quitte jamais, on peut dire qu’il ne la ramène pas, à la différence d’autres héros de séries télévisées qui se vautrent dans le luxe (Magnum, par exemple). C’est un trait de caractère que devrait avoir tous les DSI : on ne connaît pas tout, on ne maîtrise pas tout et on ne sait pas ce que nous réserve l’avenir.
  2. Il sait poser les bonnes questions. Souvent, elles n’ont qu’un lointain rapport avec le sujet, mais en apparence seulement, car il sait relier les différents éléments du puzzle pour confondre l’assassin, qui se croit toujours plus malin que les autres. Les DSI doivent aussi savoir poser les bonnes questions, non pas pour démasquer quelques intentions malveillantes de nos directions métiers, mais, au contraire, pour leur faire avouer leurs vrais besoins, y compris ceux dont ils n’ont pas encore conscience.
  3. Il ne lâche pas l’affaire. Dès lors qu’il a un soupçon, le lieutenant s’obstine à trouver les indices et les preuves de la culpabilité. Pour les DSI, cela signifie aller au bout de chaque projet, en en sécurisant toutes les étapes. De même qu’un juge ne doit avoir aucun doute sur les preuves qui lui sont présentées, une direction métier ne doit en avoir aucun sur le fait que « tout est sous contrôle. »
  4. Il rebondit sur chaque détail. Ce qui est en apparence insignifiant peut revêtir une importance capitale pour accélérer et clôturer une enquête. En matière de gestion de projet, c’est pareil : un simple petit test fonctionnel oublié peut faire s’écrouler la meilleure application. Les exemples ne manquent pas…
  5. Il travaille en équipe. Columbo prend en compte les avis de sa femme, bien sûr, mais aussi ceux de son coiffeur, de son dentiste ou de son beau-frère. Columbo mise sur l’intelligence collective pour être plus efficace. Un principe qui va de soi en matière de gestion de projet, de stratégie IT, de choix des fournisseurs ou de technologies.
  6. Il va sur le terrain. Columbo est rarement dans son bureau et encore moins en réunion de pilotage. Il est dehors jour et nuit, rien ne l’arrête et il arpente le lieu du crime. Il a compris, comme les DSI, que c’est par le dialogue avec les parties prenantes qu’il parviendra à comprendre le contexte d’un événement, la psychologie des protagonistes et l’enchaînement des circonstances. C’est, pour les DSI, la base des relations avec les métiers.
  7. Il s’appuie sur les faits, pas sur les émotions. La technique Columbo repose sur l’accumulation d’éléments factuels qui permettent de tester des hypothèses jusqu’à faire éclater la vérité. Une telle approche ne laisse pas de place à l’émotion, surtout dans un contexte de tensions. Même si ce n’est pas toujours facile, c’est un principe à suivre, surtout lorsque les projets IT se passent mal et que la DSI constitue un bouc-émissaire facile : les faits, rien que les faits !
  8. Il privilégie l’intelligence et la créativité plutôt que les moyens technologiques. L’univers de Columbo est loin de celui des Experts, d’Esprits criminels ou des surdoués de Scorpion, avec leur débauche de technologies. Le lieutenant se contente d’un crayon et d’un petit carnet de notes. Il préfère les ressources du cerveau à celles de l’informatique quantique. Ce principe pourrait judicieusement s’appliquer à l’innovation ou à limiter les dérives de l’intelligence artificielle et du big data.
  9. Il reste toujours aimable. Columbo ne se met jamais en colère, probablement parce qu’elle est mauvaise conseillère et favorise les biais cognitifs. Heureusement que dans nos DSI personne n’est sujet à des sautes d’humeur, à des emportements soudains, à des accès de colère ou n’a d’égo surdimensionné qui ferait perdre le contact avec la réalité… Sur ce point, on l’a échappé belle !
  10. Il note tout. Qu’il s’agisse d’enquêtes criminelles ou de gestion de projet IT, il faut pouvoir conserver et accéder à la bonne information au bon moment. Pouvoir reconstituer la chronologie des événements d’un projet, savoir qui a demandé quoi, qui est responsable de quoi, quelles actions ont été (ou pas) entreprises… n’est jamais inutile ! Il est toutefois difficile de suggérer que les équipes de la DSI conservent toutes les informations sur format papier. Ce serait un comble pour ceux que l’on considère comme à la pointe de la technologie ! C’est bien la seule différence entre Columbo et un DSI…