Un de mes neveux a passé le bac cette année (il l’a eu, rassurez-vous, ce n’est pas un cancre comme je l’ai été…). Discutant avec lui, j’ai demandé comment il avait traité le sujet de français sur lequel il devait plancher.
– Et toi, tu aurais répondu quoi aux questions ?
Bonne question sur les questions. On pourrait imaginer de faire passer l’examen aux DSI avec strictement les mêmes questions que celles du bac 2019. Qu’aurions-nous répondu ? Certes, nous ne sommes pas les rois de la philosophie, bien qu’il en faille une bonne dose dans notre métier. Mais les questions du bac sont tout à fait légitimes pour nous, quel que soit la filière : ES (Encore des Soucis), S (Sacerdoce), L (Lassitude).
1. « Est-il possible d’échapper au temps ? »
Quand on connaît les difficultés que nous avons à livrer les projets dans les délais, on aimerait bien échapper au temps pour que nos clients internes ne s’aperçoivent de rien ! Cela dit, ce n’est peut-être pas la solution idéale : car si l’on échappe au temps, on multiplie par dix les délais de livraison des projets, puisque plus personne ne tient plus compte des délais.
La phrase philosophique ou presque :
« Ça dépend, ça dépasse… »
Zézette, épouse X, développeuse
2. « A quoi bon expliquer une œuvre d’art ? »
Cette question est également cruciale et nous devons y répondre au quotidien, notamment lorsque les métiers nous demandent d’expliquer la nouvelle application que nous avons livrée et que nous considérons comme une véritable œuvre d’art. Un constat qui n’est évidemment pas partagé, d’où la question récurrente, qui s’applique aux œuvres d’art comme aux logiciels : « Qu’est-ce que l’auteur a bien pu vouloir dire ? »
La phrase philosophique ou presque :
« Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, de la peine, des larmes, de la sueur et des développements spécifiques »
Winston Churchill, premier ministre de l’État de l’Art
3. « La morale est-elle la meilleure des politiques ? »
Ça se saurait. Il suffit d’analyser les relations avec nos chers éditeurs de logiciels et consultants. Beaucoup ont une morale, du moins au début de leur carrière, mais d’autres ne sauraient évidemment pas répondre à cette question, car ils ne connaissent même pas le mot morale, souvent remplacé par « signez-là sans discuter et tout ira bien ».
La phrase philosophique ou presque :
« J’ai toujours préféré la chèque-liste à la check-list »
Bernard Madoff, contrôleur de gestion stagiaire à la DSI
4. « Le travail divise-t-il les hommes ? »
C’est évident, il suffit d’essayer de partager les responsabilités sur un projet considéré comme casse-gueule, imposé par la direction et générant des ennuis en cascade pour celui qui en prendra la tête. C’est la même chose pour des projets valorisants, lorsque tout le monde veut en être parce que cela fera bien sur le CV.
La phrase philosophique ou presque :
« Désolé, je ne travaille que le vendredi »
Robin Soncruzohé, DSI de la mairie de Lille-Dézerte
5. « La pluralité des cultures fait-elle obstacle à l’unité du genre humain ? »
C’est sûr que question diversité, nous sommes servis. Entre les tire-au-flanc, les grandes gueules, les développeurs schizophrènes, les chefs de projet bipolaires, les introvertis chroniques, sans oublier quelques dépressifs, j’ai une bonne diversité. Et je vous garantis que pour la gérer au quotidien c’est une vraie course d’obstacles.
La phrase philosophique ou presque :
« Le jour où les utilisateurs finaux deviendront finauds, t’as pas fini de tourner en bourrique »
Jean Gab1.0, pacha de la maîtrise d’ouvrage
6. « Seul ce qui peut s’échanger a-t-il de la valeur ? »
Non, car comme j’ai accès à tous les fichiers stockés dans notre SI, en particulier ceux des ressources humaines, des notes de frais, des emplois du temps et des e-mails, j’ai quelques dossiers sur les petits secrets de notre direction générale, des principaux managers de notre Comex et même de certains de nos actionnaires. Je ne les échange pas et je suis persuadé qu’ils ont beaucoup de valeur.
La phrase philosophique ou presque :
« Tout ce qui est à moi est à moi, tout ce qui est à toi, ça se discute »
Pablo & Scobar, artisans DSI, dématérialiseurs de factures sortantes
7. « Les lois peuvent-elles faire notre bonheur ? »
Lorsque les lois s’appliquent aux métiers pour les faire rentrer dans le rang et leur éviter soit de nous raconter n’importe quoi, soit de faire n’importe quoi, soit d’écouter n’importe qui, voire les trois à la fois, alors, oui, elles peuvent faire notre bonheur !
La phrase philosophique ou presque :
« T’as voulu voir l’audit et on a vu l’audit, mais je te le re-redis, je n’irai pas plus loin… »
Jacques Brêle, réparateur de bras cassés à la DSI de Vesoul