C’est un drame qui s’est joué dans l’entreprise Meyeur Sainou Lémeyeur, un éditeur de logiciels bien connu, qui figure en bonne place dans le déconagone magique du cabinet Gare-à-tes-nerfs qui recense les éditeurs « leaders qui ont payé cher pour y être ». Le directeur marketing, Nicolas Bétesting, a voulu se forger une opinion sur la génération de leads lorsqu’il est mort brûlé vif. « Ce n’est pas en se forgeant une opinion que on devient forgeron-marketeux », rappelle son manager, « il a voulu mettre le feu au service commercial, qu’il trouvait un peu éteint ces derniers temps, et voilà le résultat ! » On ne répétera jamais assez les dangers de la machine à se forger des opinions, outil délicat à manier et pour lequel il faut s’entourer de précautions.
« C’est incompréhensible, il aurait pu se contenter de faire comme avant et de ne pas se poser de questions sur la qualité des leads générés par les médias auxquels nous faisons appel : tout le monde sait depuis longtemps que l’on paie cher pour de la daube générée avec des fichiers vérolés, mais cela ne sert à rien de chercher à savoir pourquoi », estime l’une de ses collègues, toujours en larmes plus d’une semaine après l’accident tragique.
A ce stade, on ne sait toujours pas pourquoi a souhaité se forger une opinion et utiliser la forge à opinions sans lire le mode d’emploi. « Un éclair de lucidité ? Un fulgurant regard critique ? La volonté de faire croire qu’il est plus malin que ses collègues marketeux ? La tentation de s’extraire de la médiocrité ambiante caractéristique de son métier ? On ne le saura probablement jamais », se désole son manager, Roland Ding-Page, qui a définitivement rangé la machine à se forger les opinions dans un placard fermé à clé.